Docteur Pinguin and Mister Tux  

 

Résumé du chapitre précédent :

En raison d'un arrêté préfectoral, c'est la pharmacie Farma and Son qui sera de garde dans la nuit du 9 décembre au 18 mars à la Garennes-Bezon.

Chapitre 2

Pendant ce temps là, dans un coin paumé situé on ne sait où quelque part entre Dunkerque et Taman-Rasset (si vous savez, en face de la boulangerie), il ne se passait strictement rien du tout, mais alors que dalle ! C'est pourquoi le lecteur comprendra que l'on revienne au laboratoire secret du docteur Pinguin où la tension devenait de plus en plus palpable et était d'ailleurs de plus en plus palpée.

Le Docteur Pinguin donc, pris d'une soif subite et néanmoins soudaine, se précipita vers l'interphone et sonna la bonne.

- Gerda ?
- Foui ? (la bonne était alsacienne)
- Pouvez vous m'apporter rapidement une tisane de queues de cerise avec une goutte de Suze et un soupçon d'eau de Seltz ?
- Pien, docteur.
- Et puis aussi un sandwich thon, crevette et aïoli. (le Docteur Pinguin était un gourmet)
- Pien, docteur.
- Et n'oubliez pas le dernier numéro de mon magazine "Gros Boulons". (le Docteur Pinguin était un obsédé)
- Pien docteur, je fous apporte tout ça dans zinq minutes.

Le docteur se remit à méditer sur sa destinée. Ne se trompait-il pas dans l'entreprise qui était la sienne ? N'aurait-il pas dû continuer à élever les coquelicots dans le Grand Nord canadien (activité qui ne nourrissait certes pas son pingouin) au lieu d'essayer de poursuivre l'oeuvre scientifique de son grand oncle Vlad Dracutux, l'ignoble Pingouin des Carpathes, qui fut pendu, énucléé, émasculé, décapité puis fusillé dans la cour de son château de Transylvanie par une bande de paysans assoiffés de vengeance sous le prétexte fallacieux qu'il se nourrissait du sang de jeunes vierges ? Ce qui était certes répréhensible, mais, bon, les donzelles n'avaient elles pas qu'à courir plus vite qu'un palmypède ?

S'inquiétant de plus en plus de l'état de la situation, le Docteur Pinguin alla vers son téléphone et composa le numéro de son psychiatre et pourtant ami le Professeur Vatfer Kuirin.

A l'autre bout du fil, le Professeur décrocha :

- Wazaaaaaaaaaaaaaaa !
- Wazaaaaaaaaaaaaaaa !
- Comment allez vous - dit le Professeur qui avait reconnu la voix mélodieuse de son ami.
- Ecoutez très cher ami ! J'ai de gros souci. Il faut absolument que l'on se voit.
- Que diriez vous de demain matin ? Je pourrais passer vous voir à votre domicile.
- Parfait. Je vous remercie. A demain donc.
- A demain cher ami.
- Vous en êtes un autre.
- Mais non ! Mais non !

Le lecteur remarquera l'extrême politesse du Professeur Vatfer Kuirin et du Docteur Pinguin.

Pinguin, pris d'une fatigue de plus en plus envahissante, décida se reposer dans la petite chambre attenante à son laboratoire. Pour se détendre, il mit dans sa superbe chaîne Hi-Fi de marque Génie son disque préféré: le Concerto pour Escalator de Stockausen (*), s'allongea et s'abandonna à la douce musique. Il ne tarda pas à s'endormir oubliant totalement la bonne Gerda et sa tisane.

(*) Note de l'auteur: ce concerto existe réellement (si ! si !). Je l'ai entendu il y a longtemps sur France Musique. S'en est suivi un longue déprime dont j'ai mis du temps à m'en sortir.

Gerda, ayant fini de préparer la collation de son maître, sortit de la cuisine avec un plateau sur lequel elle avait mis un bol, le sandwich et le magazine "Gros Boulons".

Elle était mélancolique ce soir là. Elle songeait à son enfance et à son adolescence passée dans les salles de catch. Sa famille, originaire de Namur, avait décidé au début du siècle, d'immigrer en Suisse, dans la région de Zurich. Abandonnant leur plantation de frites sauvages, ils pensaient alors faire fortune grâce aux mines de cacao de la Schlazensee Strasse. Mais, profitant d'un arrêt pipi près d'une église alsacienne, son arrière-arrière-arrière grand-père s'était pris d'affection pour ces paysages verdoyants, ces maisons aux couleurs bigarrées et par le doux hullulement de la cicogne en rut en haut des tours de la Cathédrale de Strasbourg. Il décida donc de s'établir dans cette belle région.

Mais arrêtons là l'évocation du passé de cette pauvre Gerda et reprenons le cours de notre récit.

Gerda arriva à la porte du laboratoire. Elle frappa.

- Docteur ?

Silence

- Docteur ? Zes moi Gerda. Ze fou apporte fotre tissane.

Silence profond

- Docteur ? Ach ! zes k'il m'énerfe !

Silence absolu

Pendant ce temps là, alors que se déroulait dans une salle de l'Unesco une conférence de Marie-José Pérec sur le thème de "Je sais rester humble, et c'est mon choix", au milieu d'une ruelle obscure de Mézymoi-sur-Yvette …………

Voir l'episode 1 ou l'épisode 3 version 2


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